LE CORPS SAIT est une série qui explore le lien entre des patientes souffrant de scoliose et leur corset orthopédique. Elle met en scène ces jeunes femmes dans un univers onirique et intime pour parler de cette relation ambigüe, du thème de l’enfermement et du courage.
Maribé travaille sur un projet artistique qui permet à des malades atteints de différentes pathologies de transcender leur douleur en mettant en images leur histoire médicale. Par un procédé digital d’incrustations, elle plonge le spectateur dans un monde onirique qui explore les liens entre le corps et l’esprit et tente de contribuer à la guérison des malades.
Nous aurons l’occasion de vous présenter plus en détail son travail et son projet LE CORPS SAIT lors d’une prochaine interview, lorsque les conditions sanitaires nous le permettront.
“J’ai été trop tôt confrontée à la maladie.
À l’âge de 7 ans, j’ai développé une scoliose suffisamment grave pour m’obliger à porter un corset jour et nuit pendant dix ans.
Ce corset a été ma cage, et ces dix ans une prison physique et psychologique.
Un enfermement que j’ai pu surmonter grâce à un entourage très présent et ma volonté.
Et aussi grâce à l’univers artistique qui m’a permis de m’évader mentalement.” (…)
“À la fin des dix ans, j’ai compris que je gardais une empreinte invisible de ce corset, comme s’il s’était incrusté dans ma chair. Ma relation à cet objet de torture, supposé me sauver et m’éviter la difformité, était étrange. Un mélange de répulsion et d’attachement. Souvent, une envie de carapace, un désir d’armure, le besoin d’un endroit dans lequel me reposer et me cacher dans les moments de lassitude, de résignation, de destruction. Et aussi, mon corps était et resterait une ruine, malgré son harmonie apparente. Ces sentiments ambigus, contradictoires, continuent à me hanter, la sensation me revient parfois de manière inattendue, mon corps se rappelle ses anciens mouvements comme mes mains sur le piano se souviennent d’une partition des années plus tard.” (…)
“Sur les photos, le corset n’est pas forcément visible. Il est suggéré, flou, jamais il n’apparaît de manière brutale – car sa brutalité est étrangement confortable. J’ai voulu que la photographie donne une impression de peinture, qu’elle aille au-delà du réel, dans un mouvement onirique qui veut suggérer sans rien forcer. C’est un face à face avec soi-même, une introspection, un voyage intérieur, un recueillement, un deuil et un éveil. Mon désir, c’est d’amener le spectateur dans le monde de l’imaginaire et de l’intime.” (…)
“Ce projet est le premier volet d’une série que je souhaite étendre par la suite à d’autres pathologies pour aider les malades à transcender la maladie ; soutenir la recherche médicale en reversant une partie de mes recettes aux fondations et centres de recherche divers (une partie des recettes provenant des ventes des tirages de la série Le Corps sait est reversée à la Fondation Yves Cotrel – Institut de France).”
Extraits de son interview par ROTARY MAG en mai 2020